Plus psychédélique qu'une grand mère, plus baroque que la garden party de l'Elysée, plus pop qu'un pope, of cabbages and kings est une friandise qui ne se croque pas, elle est faite pour fondre tranquillement sur la langue… comme un buvard.
Of Cabbages and Kings, ça fait de l'oeil à Lewis Caroll. Le duo anglais Chad and Jeremy est classé dans ce que l'on nomme la "british invasion", mais seulement de l'autre côté de l'Atlantique à la rame. Plutôt propres sur eux, le tandem a sorti un paquet d'albums à tendance pop et folk, tous savamment orchestrés et arrangés (avec des morceaux arrangés par John Barry) avant de tomber dans la potion magique. En 1967, ils virent leur costume trois pièces d'employés de bureau, achètent des drogues et font apparaître de drôles de couleurs vives sur leurs pochettes. Et ils n'en restent pas là! Alors qu'avant, leurs compositions s'ornementaient d'orchestrations classiques, l'ambitieux "of Cabbages and Kings" est brodé de cithares, de percussions étranges avec grand renfort de clavecins. Savamment mixé, doté d'une production audacieuse et propulsant l'effet stéréophonique à un niveau de conscience lysergique, l'album joue avec les codes du psychédélisme pop, introduisant même parfois un aspect satirique en poussant plus loin certaines expériences sonores déjà entendues sur le Sergent Poivre des Beatles. L'auditeur peu averti s'en verra irrémédiablement perturbé au niveau de l'oreille interne et du système digestif. Le curieux convaincu y gagnera un voyage gratis en première classe et un goût immodéré pour l'altitude souveraine et himalayenne. Le routard des alpages y côtoiera les neiges éternelles et se verra gratifier d'un sourire béat.