Les sociétés secrètes

Touristes!

De Libreville à Pétaouchnok, le généreux accueillant étranger se voit forcé chaque été de constater le degré d'imbécillité aberrant du dévastateur hexagonal et de sa connasse embagousée et de leurs morveux infects. Gens d'une exubérante vulgarité que voilà, toujours à pinailler par principe, à s'indigner pour rien et à dénigrer sottement avant de prendre enfin la direction de leur hôtel en trompe l'oeil dans leur panzer de location.

Un sondage récent l'atteste: le touriste français devrait être interdit. Il n'est pas même bodhisattva nippon qui ne frémisse à la vue de l'infâme. « J'étais à ça de l'illumination dans ma grotte quand un touriste hexagonal est arrivé », nous écrit un émule de Han Shan par pigeon voyageur. « Je n'ai pas tenu trois minutes avant de lui infliger la prise de l'hirondelle fumasse ». Le pigeon hoche le bec. « Il m'a gonflé, aussi, à demander qu'est-ce que c'était que ce pays d'arriérés où on ne connaissait pas la fourchette et le pâté de lapin! J'étais à un bardō et demie de l'illumination! ». Haligato ami lecteur et merde puissance treize!

Me fiant à mon expérience prolongée des merdiers balnéaires, j'ai établi un tableau de classification des différents fléaux tricolores. Au premier rang des estivants insoutenables, j'ai le déplaisir de vous présenter Pierre de La Hautaine-Branlette et Cunégonde Peine-à-Jouir. « De Paris ». Attention, c'est important. Leur adresse d'imposition leur confère un surcroît d'intelligence vis-à-vis de la peuplade agricole de province. Qu'on en juge à leur aisance extraordinaire, n'est-il pas, à agrémenter leurs dires fascinants d'imparfaits du subjonctif agrées par le petit Bécherel- et cette diction, my god! Plus ampoulée qu'une interprétation de monsieur Jourdain par Roberto Alagna! Toute en ennui suave et pédanterie traînante, avec un parfum écoeurant de magnanimité. « Faites donc, mon brave ». Qu'on n'osât point infirmer le propos de ces esprits raffinés ou leur dire que leurs desiderata sont irréalisables, car alors « On ne m'a jamais parlé sur ce ton! ». Et de solliciter à grands cris scandalisés un « supérieur » qui voudra bien exaucer leurs caprices impossibles, parce que Pierre de la Hautaine Branlette n'est pas exactement n'importe qui! En somme, cette première catégorie d'emmerdeurs (la plus haïssable) est parfaitement en phase avec notre merveilleuse époque de parvenus décomplexés.  

À peine moins détestable, mais tout aussi éprouvante pour le système nerveux vient ensuite la catégorie des « Mamie Mougeaud ». C'est bien simple, la Mamie Mougeaud ne comprend rien. C'est à en jurer qu'elle en fait exprès. Mamie Mougeaud possède un talent inouï: elle complique tout. La moindre encablure à marcher « c'est compliqué parce que si il pleut, et avec mes varices, hein, et après où est-ce que je retrouve les autres, et si je rate le bus, parce que c'est quel numéro que je dois appeler et je me rappelle plus de mon code pour allumer mon téléphone? ». Ce folklore géronto-tragique repose sur la durée. Mamie Mougeaud, c'est de la jérémiade qui dure. Un accablement qui remonte en digressions pénibles vers un âge d'or douteux « où vous n'étiez pas encore né ». À ce stade, il ne suffit que de remplacer « jeunes d'aujourd'hui » par « occidentaux » et « dans le temps » par « charia » pour transformer l'évocation nostalgique de mémé en un putain de laïus de taliban. Je me souviens encore d'une visite commentée de château fort au cours de laquelle une de ces douairières exténuantes avait affirmé bien fort que  « c'était pas des fainéants au Moyen-Âge, ils étaient pas aux trente-cinq heures ». Se décline aussi en papy à-qui-on-ne-la-fait-pas.

Last but not least (pour paraphraser Pierre de la Hautaine Branlette qui se la joue avec son accent sooooo rosbif), représentant la France d'en dessous de tout, Jacky Quintéplus et Cynthia Closer. Seyant, le t-shirt Johnny Hallyday à moto au milieu des loups. Flashy, le survêtement de jogging mauve de madame. Ceux-là se trimballent en toutes circonstances une charretée de chiards intenables portant des prénoms à la con tout droit issus de la grille des programmes de TF1 et M6. Jordan, Kimberley, Lily-Rose. N'ayant pour seul référent que des soap américains, des émissions de télé-réalité trash et des magazine pipôles, ces familles n'ont tout simplement pas les moyens d'appréhender les subtilités idiosyncratiques des coins qu'elles visitent- ou plutôt qu'elles « font » (« on a ''fait'' l'Espagne!! », sic…) -, de sorte qu'elles finissent toujours par mettre les pieds dans le plat. De plus, il y en a toujours un dans le couple pour mener la vie dure au personnel. Tandis que sa grande gueule de conjoint ou de conjointe fait la blague, l'autre, mutique, hostile, retors(e), cherche la faille dans laquelle s'engouffrer pour récupérer à la force du poignet une misérable piécette. Pathétique.

3 Commentaires pour “Touristes!”

  1. rob dit :

    Tiens d’ailleurs c’est marrant que LeRennet s’identifie au phénix. Comme le phénix, rennet est unique et d’une très grande longévité (pour un site web). De plus, il mourut puis renaquit dans son nid, bien qu’il ait désormais migré au Québec en partie.

    Si c’est pour échapper aux touristes français, c’est raté !

  2. LeRennet dit :

    Quel oiseau intéressant que celui ci! Cet aspect mythologique nous sied fort bien et nous donne des ailes, merci…

  3. rob dit :

    Eh bé !
    J’espère que vous ne prenez jamais de vacances, parce que si votre râlage se rapporte à votre verbiage, vous seriez le phénix des touristes français antipathiques.

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